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Vertus cardinales
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La Force

La vertu de Force chez le P. Léonard s’est manifestée surtout en deux douloureuses occasions: celle de sa maladie et celle de son martyre. 

FORCE DANS LA MALADIE

Alors qu’il jouissait d’une bonne santé :

Je suis très occupé, pourtant j’en suis très content et je jouis d’une très bonne santé,   1

le voilà, quatre ans plus tard, atteint d’une curieuse maladie qui l’empêche de réciter son bréviaire et même de célébrer la messe. Les médicaments prescrits par les médecins ne donnent aucun résultat positif ni même le transfert à une autre résidence où le climat est plus doux :

Il me coûte beaucoup de devoir passer mes jours dans un état aussi inactif. Et quand je pense au ministère que j’exerçais et que je pourrais encore exercer si je n’étais pas malade, je tombe dans une grande tristesse. Mais quand je réfléchis que le Seigneur est celui qui envoie les infirmités pour notre meilleur bien, je me résigne à sa suprême volonté et je supporte mon mal.   2

Après avoir demandé au Supérieur de la Mission de faire une cure au Liban, Il y renonce courageusement et par solidarité avec ses confrères éprouvés par un incendie dévastateur et il choisit

de tout oublier… car je voudrais souffrir avec mes confrères les conséquences de l’incendie après avoir passé d’heureux jours en leur compagnie… Je souffre toujours… Il m’est très pénible de passer tout mon temps dans cet état.   3

Un mois plus tard, il réitère sa demande au Père Général :

Il y a un an que je souffrais d’un mal de tête acharné… A présent encore, je souffre comme par le passé… Je souffre beaucoup dans cet état inactif.   4

Nous ne pouvons qu’admirer la force et la résignation de ce religieux qui souffre physiquement et moralement et qui, malgré l’inefficacité des remèdes, persévère dans sa mission.

A ceux qui protestent et accusent le P. Léonard, en se basant sur le jugement du P. Ange de Clamecy qui dit :

La neurasthénie est, chez le P. Léonard, maladie mentale et morale… je souhaite que l’air natal soit plus efficace que les autres remèdes,   5

nous répondons poliment : depuis quand le P. Ange est-il psychiatre ? Et comment se fait-il qu’avant 1910 il n’y a eu aucun indice de malaise? Comment se fait-il qu’après un changement de climat, le P. Léonard a repris ses travaux sans aucune nouvelle mention de sa migraine ? Coïncidence curieuse ! Mgr. Ignace Maloyan subit, presqu’en même temps, un phénomène semblable, qui l’obligea de quitter Mardine pour l’Alexandrie :

…Déjà atteint de l’asthme depuis huit ans, sans que les soins médicaux puissent m’en débarasser, l’hiver rigoureux de cette année aussi bien que des fatigues et de graves soucis de mon diocèse ont aggravé la maladie de sorte que des crises fréquentes me tuaient journellement par des suffucations déchirantes. Me trouvant, si ce n’est pas dans un péril de vie, au moins dans une situation intolérable, je fus obligé en plein hiver de venir ici à Alexandrie pour consulter mes médecins et trouver un peu de soulagement.  Arrivé ici j’ai informé Son Excellence Monseigneur P. Terzian, notre Patriarche, vu que préalablement je lui avais écrit de mon intolérable situation et je ne pouvais pas attendre sans risquer de voir ma maladie de plus en plus aggravée.  Depuis mon arrivée à Alexandrie, je suis d’humeur maussade et pour comble, j’ai souffert d’une pneumonie si aiguë que je me suis alité quinze jours durant.   6

Le P. Léonard n’en a que plus de mérite : avec la souffrance physique, il accepte la torture morale de l’inactivité forcée où il se trouve.

FORCE DANS LE MARTYRE

Quand La Turquie se lança dans la persécution et l’exécution de son plan de génocide, le P. Léonard accepta de fuir parce que ... il désirait sortir du milieu de ces sauvages… il ne voulait pas mourir massacré.  7

Même réaction humaine semblable à celle du Christ : « Père, que ce calice s’éloigne de moi ». Mais, rempli d’un grand amour pour ses frères, spécialement son confrère le P. Daniel, il resta à sa place, sachant qu’il allait certainement mourir.

Il fit de même au matin du 5 décembre 1914, quand les Turcs perquisitionnèrent sa résidence. Après avoir sauvé les Saintes Hosties, ... il retourna aussitôt, parce qu’il avait décidé de passer sa nuit au couvent. Les soldats lui dirent qu’il n’aurait d’accès qu’à l’arrière cuisine. Mais au beau milieu de la nuit, un agent insolent vint réquisitionner tous les matelas et força le P. Léonard à sortir et à rester jusqu’au matin à la belle étoile.   8

1   Lettre du P. Léonard au P. Général, Mardine , 11 décembre 1906 , Archives Générales des Capucins à Rome, Fonds H72, Privati 86.

2   Lettre du P. Léonard au P. Général, Maamouret-el-Aziz, 23 décembre 1910 , Archives Générales des Capucins à Rome, Fonds H72, Privati 7.

3   Lettre du P. Léonard au Supérieur de la Mission, Maamouret -el-Aziz, 29 mars 1911 , Archives Générales des Capucins à Rome, Fonds H72, Privati 15.

4   Lettre du P. Léonard au P. Général, Maamouret-el-Aziz, 29 avril 1911 , Archives Générales des Capucins à Rome, Fonds H72, Privati 14.

5  Lettre du P. Ange de Clamecy au P. Général, Maamouret-el-Aziz, 25 avril 1911, Archives Générales des Capucins à Rome, Fonds H72, Privati 15.

6  Lettre de Mgr. Maloyan, 26 décembre 1912, Positio Mgr. Maloyan, p. 135.

7   Rapport du P. Bonaventure de  Baabdath  envoyé au P. Général , Beyrouth, 1919, Archives Générales des Capucins à Rome, Fonds H72, Acta Ordinis 15.

8   Ishac Armalé, Al-Qouçara fi nakabat annaçara , 1919, p 245.

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...et, une fois de plus, la bure franciscaine fut teinte du sang des martyrs...
LeonardMelki
© Farés Melki 2013